Session Overview |
Thursday, June 06 |
13:30 |
Comment les aîné.e.s prennent-ils/elles place dans l'espace public ? Regards croisés entre le Sénégal et la France
* Thibauld Moulaert, Université Grenoble Alpes - Laboratoire PACTE, France * Helen Klein, Université Grenoble Alpes - Laboratoire PACTE * Valkiria Amaya, Université Grenoble Alpes - Laboratoire PACTE & AGEIS * Fatoumata Hane, Université Assane Seck de Ziguinchor et Unité Mixte Internationale 3189 Environnement, Santé, Société CNRS, Senegal Ibrahima Demba Dione, Université Assane Seck de Ziguinchor Nicolas Vuillerme, Université Grenoble Alpes - AGEIS & Institut Universitaire de France Federica Gatta, Université Grenoble Alpes - Laboratoire PACTE Ce symposium discute les principaux enseignements - scientifiques, méthodologies et heuristiques – qui nous retenons de l’enquête ‘Citizenbench, des bancs pour les aîné.e.s ?’ que nous avons menée de 2019 à 2023 en France (Chambéry, Grenoble) et au Sénégal (Dakar). Tout d’abord, d’un point de vue méthodologique, cette enquête a permis à une équipe pluridisciplinaire (sociologues, anthropologue, géographes, architecte, paysagiste, e-santé) et transgénérationnelle (stagiaire de niveau master, doctorantes, enseignants-chercheurs débutants, professeurs d’université confirmés) et internationale de travailler, ensemble, autour de l’objet des « bancs publics pour les aînés ». Pour ce faire, la recherche s’est d’abord constituée autour de la création et l’utilisation de grandes bâches plastifiées de 24m2, appelées « Cartes Gulliver ». Elles représentent en effet, via une photographie satellite de haute qualité, l’ensemble d’un quartier à l’étude, sur laquelle, les passants (aînés ou non) et les chercheurs deviennent des géants, tel que Gulliver de Jonathan Swift, et s’approprient, pour un instant, un quartier. Ces Cartes Gulliver ouvrent alors la porte à une série de méthodes participatives permettant d’envisager le rapport à l’espace public des aîné.e.s (Communication 1, Amaya/ Moulaert/Vuillerme). Elles questionnent aussi la pertinence du concept « d’intermédiaire du vieillissement actif » qui a également influencé cette enquête et dont il s’agit de mesurer la pertinence heuristique à travers ce symposium (Communication 4, Moulaert/Klein/Gatta). Ensuite, le symposium vient apporter des données empiriques sur les rapports des aîné.e.s à l’espace public au travers du prisme des bancs publics. En France, une typologie de ces bancs publics se dégage et croise les justifications d’élus et techniciens de Grenoble et Chambéry avec les formes d’usages, imaginaires et réels, qu’en font des habitants plus âgés de ces espaces (Communication 2, Klein/Moulaert). Au Sénégal, on note également chez les techniciens de l’aménagement de la ville de Dakar ces formes d’usages imaginaires au point de retrouver dans leurs discours des concepts renvoyant à des réalités très éloignées des pratiques usuelles d’appropriation de l’espace public notamment « le banc anti SDF » et la construction de jardins publics avec une segmentation de cet espace en fonction de différentes catégories sociales comme les jeunes, les femmes et hommes âgés. Ceci pour dire qu’il y a une collusion entre les politiques d’aménagement de l’espace urbain et une approche plus locale de l’espace public qu’imposent les populations. Les bancs publics -importés- dans le cadre d’un aménagement socio-technique qui excluent du fait que l’espace public est polysémique et fait l’objet de type d’appropriations diverses selon les catégories considérées et les usages différenciés. Dans la ville de Dakar, au Plateau et à Ouakam, des formes d’organisation sociale, politique et religieuse comme les « Pencc » apparaissent comme des lieux de résistance qui structurent l’espace social et public produit et contrôlé par les personnes et pour les personnes âgées (Communication 3, Hane/Demba Dione). Au final, ce symposium veut souligner comment l’entrée par un objet microsociologique comme les « bancs publics pour les aînés » offre une opportunité pour interroger l’espace public, soit cet objet relativement peu étudié en tant que tel, littéralement coincé entre d’une part les nombreux travaux sur le « chez soi » (ageing in place) centrés autour du domicile, et d’autre part les recherches qui assimilent l’espace public à un espace de débat de la citoyenneté et étudient, pour ce faire, les formes de représentation sociale des aînés. |
13:30 |
Les « Cartes Gulliver » sont-elles des « intermédiaires du vieillissement actif » ? Retour sur l'exhaustivité et les limites d'un concept émergent
* Thibauld Moulaert, Université Grenoble Alpes - Laboratoire PACTE, France * Helen Klein, Université Grenoble Alpes - Laboratoire PACTE Federica Gatta, Université Grenoble Alpes - Laboratoire PACTE Si nous avons commencé à concevoir les « intermédiaires du vieillissement actif » (IVA) dès 2012 à partir de la figure des professionnels de l’emploi chargés d’accompagner des chômeurs âgés, nous l’avons élargie via l’enquête Citizenbench à l’objet des « bancs publics pour les aînés ». En nous inspirant des STS, nous les définissions comme autant de « dispositifs sociotechniques (alliances d’humains et de non-humains) qui mobilisent et diffusent de l’information pour influencer un public ciblé sur un critère d’âge afin que ses membres adoptent des actions jugées souhaitables par ses promoteurs, ceux-ci s’assurant un rôle de tiers entre le public cible et les acteurs susceptibles de concrétiser les actions visées » (Moulaert, 2012). Reprenant celleci, cette communication entend questionner les « Cartes Gulliver », soit ces grandes bâches plastifiées de 24m2 fabriquées pour « entrer sur le terrain » avec une équipe pluridisciplinaire et transgénérationnelle. En effet, si l’on reprend les travaux de Dominique Vinck et Alain Jeantet sur les « objets intermédiaires » et sur les « objets frontières » dans les processus de conception, alors nous avons la possibilité de questionner nos bâches selon les trois logiques de la traduction, la médiation et la représentation (Jeantet, 1998 p. 299). Ainsi, les « Cartes Gulliver » viendraient traduire une matérialisation en partie inattendue (par les chercheurs) des lieux étudiés à travers la visualisation, sur ces cartes, de l’ensemble des bancs publics relevés et marqués via des points violets. Elles sont ensuite l’occasion d’une confrontation entre chercheurs et entre chercheurs et passants, ce qui ouvre une forme de médiation provoquée par l’occupation de l’espace public par ces grandes cartes d’une part, et par le questionnement que suggèrent les différents « points violets » d’autre part. Enfin, devenant un « porte-parole fiable » (Vinck, 2009) de nos « bancs publics » dans le chef des chercheurs, ces « points violets » donnent en réalité à voir une grande diversité de représentations possibles dans le chef des passants, aîné.e.s ou non. Se pose alors la question de « l’équipement », suffisant ou insuffisant, testé à travers cet exercice cartographique, afin de faire se rencontrer dans un objet (la carte Gulliver) des objets et des représentations (les bancs publics et leurs représentations réelles ou supposées) et des publics cibles (les aîné.e.s dans un quartier précis d’une ville précise). En conclusion, cette communication revient sur les limites de cette méthode, volontairement non directive, qui a certes permis d’identifier des aîné.e.s intéressé.e.s et prêts à être enrollé.e.s dans la suite de l’enquête, mais qui a manqué de cadrage pour en tirer un bénéfice pour large. Ces limites pourraient alors s’adresser aux différents dispositifs qui, à l’instar des bancs publics, sont conçus comme autant d’IVA. |
13:50 |
Comment les bancs publics ont généré la recherche de méthodes participatives à l'instar des « cartes Gulliver », du suivi GPS et des « parcours commentés » ?
* Valkiria Amaya, Université Grenoble Alpes, France * Thibauld Moulaert, Université Grenoble Alpes, France Nicolas Vuillerme, Université Grenoble Alpes, France Les quartiers sont extrêmement importants pour les personnes âgées, car c'est là qu'elles passent une grande partie de leur vie quotidienne et qu'elles ont des interactions sociales. L’entrée territoriale sur le vieillissement laisse entrevoir un ensemble de questions complémentaires où l'environnement du quartier devient la focale d’analyses et l'objet de recherche. Comment comprendre les interactions entre l’espace et la qualité de vie des aînés, notamment en perte d’autonomie ? Comment expliquer les processus de mises à l’écart progressif et de repli sur le « chez soi » ? Et, quel sens donnent les aîné·e·s à leurs sorties ou à l’arrêt de leurs sorties ? La combinaison de méthodes géospatiales et participatives a le potentiel d'éclairer les processus complexes qui se déroulent entre les personnes et les lieux. S’inscrivant initialement dans le projet de recherche Citizenbench, notre recherche s’en est inspiré pour développer notre propre recherche. Au départ, nous avons participé à la fabrication et à l’utilisation (1) de « Cartes Gulliver » (soit de grandes bâches de 24m2 où sont représenté les quartiers d’études) pour mieux comprendre l'effet de l'environnement socio-spatial sur l'autonomie et la qualité de vie des personnes âgées ; aujourd’hui, notre travail combine (2) des « entretiens en marchant », également décrits comme « parcours commentés » ou « Go-Along interviews » en anglais, (3) des suivis GPS de parcours habituels de personnes âgées pendant une semaine, ces suivis étant accompagnés du remplissage de journaux de voyage quotidien puis d’entretiens ultérieurs. En nous basant notamment sur plusieurs revues de littérature et sur les premières données empiriques de notre thèse (à ce stade, nous avons mené 37 « entretiens en marchant » et récolté 37 suivis GPS), cette communication revient sur l’intérêt de la combinaison entre des données qualitatives issues des « entretiens en marchant » et des données quantitatives issues des relevés GPS afin de mieux comprendre la diversité des significations de la marche, particulièrement quand la perte d’autonomie apparait. |
14:10 |
« Des bancs publics pour les aîné·e·s » : ces intermédiaires du vieillissement actif
* Helen Klein, Université Grenoble Alpes, France * Thibauld Moulaert, Université Grenoble Alpes Cette communication propose d’étudier la manière dont les bancs publics sont à la fois conçus comme un outil au service du « vieillissement actif et en santé », matérialisant un ensemble de discours et justifications politico-techniques et comment l’objet même produit des représentations et des usages. Cette communication se centre sur les terrains de Grenoble et Chambéry en France. Un premier axe se dégage alors quant à la justification des « bancs pour les aînés » oscillant entre des explications appuyées par des formes variées d’expertise, et des explications empruntant davantage au registre de l’expérience. Partant des observations réalisées à l’aide des « Cartes Gulliver » d’une part et des « visites commentées » d’autre part, un deuxième axe se dégage autour des formes d’usages, imaginaires et réels. Ici, on distingue des usages limités voir absents qui s’opposent à des usages assumés, projetées ou observés. En conclusion, cette communication reviendra sur la signification de la présence d’aîné.e.s dans l’espace public sur et autour de ces bancs. Au final, on se demandera si la présence ou l’absence d’un individu vieillissant dans l’espace public peut être considérée comme une affirmation de sa citoyenneté (ou de son absence) et de sa (non) reconnaissance. |
14:30 |
Perception et appropriation des bancs à Dakar : approche sociotechnique versus usages différenciés
* Fatoumata Hane, Université Assane Seck de Ziguinchor, Senegal Ibrahima Demba Dione, Université Assane Seck de Ziguinchor, Senegal Cette communication interroge le « banc » au prisme de la manière dont il est perçu, représenté et utilisé aussi bien dans l’espace public (aménagement/mobilier urbain), dans les espaces socioreligieux (« Pencc ») ainsi que dans les formes d’appropriation par les différents acteurs au Sénégal. Chez les techniciens de l’aménagement de la ville de Dakar, les formes d’usages sont imaginaires au point de retrouver dans leurs discours des concepts renvoyant à des réalités très éloignées des pratiques usuelles d’appropriation de l’espace public notamment « le banc anti SDF » et la construction de jardins publics avec une segmentation de cet espace en fonction de différentes catégories sociales comme les jeunes, les femmes et les hommes âgés. Ainsi, le banc tel qu’imaginé ne renvoie pas aux usages dont il est destiné au sens où l’espace est également obstacle notamment pour les personnes âgées. Ceci pour dire qu’il y a une collusion entre les politiques d’aménagement de l’espace urbain et une approche plus locale de l’espace public qu’imposent les populations. Les bancs publics – importés – dans le cadre d’un aménagement sociotechnique qui exclut du fait que l’espace public est polysémique et fait l’objet d’appropriations diverses selon les catégories considérées et les usages différenciés. Dans la ville de Dakar, au Plateau et à Ouakam, des formes d’organisation sociale, politique et religieuse comme les « Pencc » apparaissent comme des lieux de résistance qui structurent l’espace social et public produit et contrôlé par les personnes et pour les personnes âgées. |